L’instant magique d’un miracle spatial et humain Chez Pierre Souchaud, l’univers du dehors s’agence comme un puzzle immense. Des pans de fragile étendue chromatique, vastes et puissants, s’interpénètrent en un tout dynamique, émouvant et mouvant, dense et instable. Tout pourrait basculer vers un autre éphémère, vers un autre possible. L’incertitude ose dire les saisissements du mystère, et l’étrangeté neuve du monde. Pierre Souchaud n’aime les mortes réponses de la triste raison, ni les piètres victoires des apparences. L’univers vital ne tient pas en place. Pierre Souchaud ignore l’immobilité mortifère. Ce qu’il saisit est toujours en constante gestation. Art sans cesse métamorphique où le vocabulaire resserré crée des rythmes profonds, où les formes créées se touchent, s’inquiètent, s’auscultent, et s’étreignent. Sobres et assourdies, les couleurs creusent toute surface, et s’éloignent vers l’insondable. Méditatives, elles ne vont pas au-devant du spectateur. Elles tiennent grandement aux voiles diffus de l’existence. Dans ces vives peintures, le dehors et le dedans se rejoignent, et le monde pictural naît de ces embrassements. La matière, subtilement travaillée, tient du parchemin d’âme, et de peau lointaine aux sombres plis indéfinis. S’il y a paysage, verticale et abstrait, le corps profond en serait l’horizon caché. Sur fond de douces ténèbres, couleur de vieille terre et de boue intime, surgissent de claires fenêtres chromatiques, fines clartés qui ensemencent l’espace. Tout bouge, dans cette fine érotique d’univers. Pierre Souchaud a saisi l’instant magique d’un miracle spatial et humain, où les soubresauts de la chair secrète épouseraient les mouvements profonds de l’univers. Une souterraine sensualité anime l’œuvre tout entière. Les espaces se pénètrent en picturale et secrète extase. Coït cosmique, aux limites du tragique et de la volupté. Christian Noorbergen |